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Legal Insights 24 mars 2025

Fusion-absorption : Disparition de la personnalité juridique de l’absorbée et action en justice

Par un arrêt rendu le 15 janvier 2025, la Cour de cassation confirme que la fusion-absorption entraîne l’extinction de la personnalité juridique de la société absorbée, lui interdisant d’ester en justice. Une irrégularité ne peut être corrigée par la constitution ultérieure de la société absorbante.

Les conséquences des opérations de fusions-absorptions ont été l’objet de plusieurs précisions jurisprudentielles ces dernières années, qu’il s’agisse du sort de la caution, du transfert des responsabilités ou des subtilités procédurales. Dernièrement, par un arrêt rendu le 15 janvier 2025 (23-84.906), la chambre criminelle de la Cour de cassation a confirmé que la fusion-absorption entraînant l’extinction de la personnalité juridique de la société absorbée, celle-ci ne peut plus ester en justice. Une irrégularité de constitution en première instance ne peut être corrigée par la constitution ultérieure de la société absorbante en appel.

La prise en compte procédurale de la disparition de la personnalité juridique lors d’une fusion-absorption

Une société, absorbée par fusion au 1er janvier 2016, s’était constituée partie civile lors d’une audience du tribunal correctionnel le 1er février 2017. En appel, c’est toutefois la société absorbante qui avait repris ses droits et s’était, à son tour, constituée partie civile.

Dans son pourvoi, le demandeur critiquait notamment la Cour d’appel de Fort-de-France d’avoir déclaré recevable la constitution de la société absorbante alors même que celle-ci ne s’était pas constituée en première instance.

La Cour de cassation a censuré l’arrêt d’appel pour défaut de motivation. Selon la Haute juridiction, les juges du fond auraient dû vérifier si, au moment de l’audience du 1er février 2017, la société absorbée disposait encore d’une existence juridique lui permettant d’agir en justice. En d’autres termes, si la fusion avait déjà produit ses effets et entraîné la disparition de la personnalité morale de la société absorbée, celle-ci n’ayant plus la capacité d’ester en justice.

Un cas d’application qui confirme la jurisprudence récente

In fine, cette solution s’inscrit dans une jurisprudence bien établie de la Cour de cassation, qui rappelle de manière constante que la perte de la personnalité morale d’une société absorbée entraîne son incapacité à agir en justice. Une irrégularité ne pouvant être corrigée par l’intervention ultérieure de la société absorbante.

La chambre commerciale de la Cour de cassation avait jugé qu’un appel formé par une société dépourvue de personnalité morale ne pouvait être régularisé par l’intervention ultérieure de la société absorbante (Cass. com., 13 mars 2019, n°17-20.252). De même, la Cour a estimé qu’une assignation délivrée par une société absorbée était irrégulière dès lors que celle-ci avait perdu son existence juridique au jour de l’acte introductif d’instance (Cass. civ. 2e, 12 février 2004, n°02-13.672).

Cette décision n’est pas non plus sans rappeler un arrêt de la Cour de cassation (Cass. Civ 2e, 8 septembre 2022, n°21-11.892), dans lequel le demandeur avait, cette fois, assigné une société n’ayant plus d’existence juridique. Bien que la société absorbante soit intervenue volontairement à l’instance, la Cour de cassation a estimé que cette irrégularité de fond ne pouvait être régularisée par la constitution de l’absorbante.

Plus récemment, les juges du droit avaient également précisé certaines règles procédurales en rappelant notamment que la partie adverse doit présenter des demandes à la société absorbante lorsque celle-ci vient au droit de l’absorbée (Cass. Com, du 18 septembre 2024, n°23-13.453).

Ainsi, la Cour de cassation semble avoir largement clarifié le contentieux autour des questions procédurales entourant le domaine des fusions-absorptions et notamment concernant l’absence de personnalité morale et de capacité à ester en justice en fonction des différentes situations (assignation, reprise d’instance…).

Bien que l’arrêt, sujet du présent article, ne fasse pas l’objet d’une publication au Bulletin de la Cour de cassation, celui-ci présente néanmoins le mérite de préciser une nouvelle application des principes esquissés par la Cour.